Rachid Badouri ne parle jamais de religion.

"Parlant de la commission, une autre chose m'agace terriblement: la naïveté des jeunes.

«Tout le monde il est beau, tout le monde est gentil, vive l'ouverture, la tolérance, l'acceptation, le dialogue, le mélange...»

Autant les xénophobes qui voient des barbares partout m'inquiètent, autant les scouts de l'humanisme interculturel me donnent des boutons. Ils sont les deux faces de la même ignorance..."

Richard Martineau
L'autre ghetto


Pourquoi Richard Martineau a t-il un discours différent envers le jeune Rachid Badouri, dans sa chronique Viva Rachid !, de celui qu'il a fait envers les jeunes Québécois de la commission ? Pourtant. Rachid Badouri est né au Québec.

...en l'écoutant rire avec gentillesse et humanité de «notre» culture et de celles «des autres», une idée m'est venue en tête.
Pourquoi ne l'enverrait-on pas faire le tour du Québec en première partie de la commission Bouchard-Taylor?(Richard Martineau)

Il ne fait aucun doute que Richard Martineau considère le jeune Badouri comme un immigrant, et donc en droit de se comporter comme un "scout humaniste". Ce qu'il refuse et reproche aux jeunes Québécois.

Mais lorsque Martineau dit que Badouri rit avec gentillesse de "notre" culture et de c'elles "des autres", il semble vouloir placer le jeune Badouri dans le même mystérieux coin "neutre" qu'il se réserve lui-même. C'est sûrement ce qui lui plaît chez Badouri. Ce "détachement" culturel identitaire. Ethnique.

Son commentaire suivant est encore plus révélateur:
Ce qui est extraordinaire, avec Rachid Badouri, c'est qu'on passe la soirée à rire des Vietnamiens, des Marocains, des Italiens et des gens du Lac-Sant-Jean sans jamais se sentir mal ou honteux. On rit avec eux, et non d'eux.

Pour Richard Martineau, tous ceux nommés dans cette liste sont des "eux". Il ne s'identifie lui-même à aucun d'eux. Pourtant je suis certain que beaucoup de gens dans la salle autour de lui s'y identifiaient. Il ne pouvait donc pas rire "avec" eux, sinon il aurait inclu dans sa liste un identitaire dont il se reconnaît. Peut-être n'en a t-il pas, dans son coin neutre, avec Badouri.

En effet, dans cette liste, Badouri ne s'y reconnaît pas plus que ses parents dont il est issu. Badouri ne rirait pas de son ethnie, car c'elle-ci, comme les Québécois, se bat toujours pour sa survie et le droit à son épanouissement. Son grand-père ne lui pardonnerait pas.

Richard Martineau n'est pas un xénophobe qui aurait vu un barbare en Badouri, mais de trop avoir voulu y voir ce qu'il souhaitait y voir, il n'a pas eu assez de l'ouverture curieuse du scout pour voir le Berbère en Badouri.

Nos jeunes Québécois naïfs à la commission n'ont pas le luxe d'avoir des grand-pères pour leur conter, au coin du feu, leur histoire et ce qu'ils sont, comme Badouri en a. Il pourrait le dire, lui, qui il est, de quoi il est issu, le combat que son peuple mène. Mais comment parler de ces choses à des gens qui croient qu'ils n'ont pas d'histoire et qui ne sont issus de rien ?

Non, Badouri ne parle pas de religion ni de politique. Il ne parle pas de lui.
Il est là pour nous faire rire. Nous amuser. Un peu comme Richard Martineau.